
Le bras de fer entre DAZN, principal diffuseur de la Ligue 1, et la Ligue de Football Professionnel (LFP) prend une nouvelle tournure. La plateforme de streaming britannique rĂ©clame dĂ©sormais 573 millions d’euros Ă l’instance devant le tribunal de commerce de Paris. DAZN dĂ©nonce depuis plusieurs semaines des conditions d’exploitation difficiles, notamment en raison du piratage et du manque de coopĂ©ration de certains clubs pour valoriser le “produit Ligue 1”.
Le nombre d’abonnĂ©s serait aujourd’hui bien en deçà des attentes : 500 000 au lieu des 1,5 million espĂ©rĂ©s depuis la signature de son contrat en juillet 2024. DAZN, qui dĂ©tient les droits de huit matchs de Ligue 1 par journĂ©e jusqu’en 2029 pour 400 millions d’euros annuels, accuse la LFP de “tromperie sur la marchandise” et lui rĂ©clame 309 millions d’euros Ă ce titre. La plateforme ajoute Ă cette demande 264 millions d’euros pour “manquement observé”, portant l’ardoise totale Ă 573 millions d’euros.
Menace de retrait
Cette nouvelle étape du conflit intervient alors que les clubs professionnels s’inquiètent déjà de la forte baisse des revenus liés aux droits TV. En toile de fond, la crainte d’un départ de DAZN en décembre 2025, une possibilité prévue par une clause du contrat. Un scénario qui ferait écho au fiasco Mediapro en 2020 et plongerait le football français dans une nouvelle crise financière.
L’inquiétude des clubs a été renforcée par la décision de DAZN de ne régler que la moitié d’une échéance de paiement de 70 millions d’euros, soit seulement 35 millions d’euros. En réponse, la LFP a saisi le tribunal de commerce en référé. En attendant l’ordonnance prévue le 28 février 2025, la Ligue a annoncé qu’elle puisera dans son fonds de réserve pour aider les clubs à couvrir leurs besoins de trésorerie.
Lors du Conseil d’administration de la LFP, lundi 17 février dernier, son président Vincent Labrune a appelé à l’unité face à la crise, selon une source proche du dossier. Une prise de parole qui intervient alors que des tensions vives opposent les dirigeants des clubs sur la stratégie adoptée en matière de droits TV.
Fracture au sein des clubs
Cette crise a ravivé les divisions entre les soutiens de Vincent Labrune, réélu en septembre 2024, et ses opposants, de plus en plus virulents. Ces derniers contestent le choix du duo DAZN et Bein Sports (un match pour 100 millions d’euros annuels) pour la diffusion de la Ligue 1. Parmi les figures de cette fronde, figurent John Textor (Lyon) et Joseph Oughourlian (Lens). Les deux présidents dénoncent également un conflit d’intérêts impliquant Nasser Al-Khelaïfi, président du Paris SG par ailleurs dirigeants de Bein Media Group, maison mère de Bein Sports en France.
Dans une interview accordée à Le Parisien, Joseph Oughourlian avait évoqué des alternatives : “La première serait de faire notre propre chaîne, explique t-il. Beaucoup ne le comprennent pas à la Ligue, et certains conflits d’intérêts compliquent cette option. La deuxième est de retourner voir des acteurs sérieux comme Canal+.”
Canal+ de retour ?
Justement, la question du retour de Canal+ demeure. L’ancien diffuseur historique de la Ligue 1, est-il prĂŞt Ă revenir après avoir Ă©tĂ© Ă©cartĂ© en 2020 et depuis le dĂ©but de la saison ? Selon une source proche du dossier, la chaĂ®ne cryptĂ©e voudra “imposer son rythme et son calendrier”. L’Équipe affirmait mardi dernier qu’aucune discussion n’était engagĂ©e en ce sens.
Face à cette crise, le président de la Fédération Française de Football (FFF), Philippe Diallo, a convoqué une réunion le 3 mars prochain avec des représentants de la LFP, des clubs, du gendarme financier du football français (DNCG) et du fonds d’investissement CVC, impliqué dans la création de la société commerciale de la Ligue.
« En Ligue 1 et Ligue 2, certains clubs sont en grande difficulté, avait alerté le patron de la FFF le 13 février dernier. Mon rôle est d’essayer d’éviter des défaillances. On n’est pas à l’abri d’arrêts en fin de saison, voire avant. La situation n’est pas bonne pour la crédibilité de notre football. ». Philippe Diallo appelle à une réflexion approfondie sur le modèle économique et la gouvernance du football professionnel. (Avec AFP)
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