L’absence de clim’ au Village olympique jette un froid

Depuis cet été, le deuxième plus chaud de l’histoire jamais enregistré dans l’Hexagone, avec plusieurs épisodes de très fortes chaleurs, la question de l’acclimatation des athlètes pendant les Jeux olympiques de Paris 2024, disputés du 26 juillet au 11 août, est devenue encore plus prégnante. La crainte d’un été caniculaire pose la question des futures conditions de vie des sportifs dans le village olympique dont les appartements sont prévus sans climatisation.

A cheval entre Saint-Denis, Saint-Ouen et l’île Saint-Denis, proche de la Seine, le village, qui doit être achevé à la fin 2023, pourra accueillir près de 14 000 personnes, athlètes et encadrement, pendant les Jeux. Entouré par sept hectares d’espaces verts, promis à une neutralité carbone, avec une utilisation de matériaux dédiés à la performance énergétique, le lieu doit ensuite être reconverti en logements familiaux et étudiants, dont 25 à 40% de logements sociaux selon les communes.

“Une question de société”

Interrogé sur les conditions que pourraient rencontrer les sportifs en cas d’épisodes de fortes chaleurs pendant les Jeux, Nicolas Ferrand, le directeur général de la Solideo, société chargée de construire les ouvrages pérennes de l’événement, botte en touche. « Nous, nous construisons des chambres où il fera moins 6 degrés par rapport à la température extérieure, » a-t-il assuré lors d’une conférence de presse mardi 17 janvier 2023. Un engagement contractualisé qui correspond aux projets à la fois des collectivités et des organisateurs.

« Si après, les collectivités ou le Cojo [comité d’organisation des Jeux] changent la commande, dont acte, a ajouté Nicolas Ferrand. Mais à ce moment là ce n’est plus la même chose. (…) S’il faut changer, avec l’objet technologique que l’on a mis en place (..), là c’est de la clim. Mais à ce moment là le bilan carbone n’est pas le même. C’est une question de société. Est-ce que collectivement on accepte d’être à moins 6 degrés et d’avoir un excellent bilan carbone, ou alors on dit ça va pas, et on est prêt à dégrader le bilan carbone ».

Le scénario d’un été caniculaire, avec des températures pouvant dépasser les 40 degrés pendant plusieurs jours, a d’ores et déjà été envisagé par les organisateurs, qui ont décidé de se pencher avec encore plus d’acuité fin août sur la question après l’été bouillant qui a traversé la France.

De la clim’ à Tokyo

Le directeur général du Cojo Etienne Thobois avait indiqué fin août avoir d’ailleurs lancé « un groupe de travail spécifique sur le sujet, en s’appuyant notamment sur l’expertise des fédérations internationales ». Il précisait : « Il est clair qu’on a beaucoup appris à Tokyo sur ce sujet (…) Aujourd’hui, on voit bien que ce seront potentiellement des sujets qu’on doit bien aborder pour Paris 2024 ».

Lors des derniers Jeux à Tokyo à l’été 2021, les athlètes ont en effet pu se confronter à des épisodes de fortes chaleurs, avec un fort taux d’humidité. « Certes, mais à Tokyo, il y avait de la clim’ partout. Et là, la question semble ne pas avoir été anticipée pour Paris, » regrette un acteur influent du mouvement sportif. « Le Cojo veut un projet écologique, mais là il se confronte à la réalité. C’est clairement un sujet la température dans les chambres, » assure cet acteur sous couverts d’anonymat.

« Imaginez plusieurs jours d’affilée à plus de 40 degrés, dans des chambres à 34 degrés. C’est quand même assez fou que ces scénarios n’aient pas entraîné de modification, regrette-t-il. Il y a des fédérations qui tentent déjà de trouver des solutions de repli, d’essayer de se loger ailleurs. S’ils continuent comme ça ils vont vider le village ». « C’est toujours un sujet en “work in progress”, il y a d’autres solutions alternatives à la clim’, type plancher réversible, ventilateur, explique t-on chez Paris 2024. Mais on travaille sur le sujet, sauf que ce n’est pas complètement établi. On en parle avec la commission des athlètes ». (AFP)

© SportBusiness.Club Janvier 2023