Le très lucratif contrat de sponsoring entre la plateforme de streaming audio Spotify et le FC Barcelone, qui a été ratifié par les Socios lors d’une Assemblée Générale ce dimanche 3 avril 2022, marque, selon des experts, le début d’une « nouvelle ère » du sponsoring, dominée par les acteurs de l’économie numérique. « Cryptomonnaies, blockchain, NFT, services en ligne, plateformes, logiciels de visioconférence… Les acteurs qu’on voit émerger aujourd’hui sont majoritairement des entreprises ou des marques issues du secteur de la tech et du digital, au sens large, » énumère Pierre-Emmanuel Davin, directeur général de Nielsen Sports, une société spécialisée dans le marketing sportif. « Ce sont des acteurs qui sortent renforcés de la pandémie. Leurs services sont de plus en plus utilisés, plébiscités dans les modes de consommation, » note-t-il.
Spotify, première plateforme de streaming au monde avec plus de 400 millions d’utilisateurs actifs, va accoler son nom sur le célèbre maillot blaugrana du Barça et sur son stade mythique, le Camp Nou, pour 70 millions d’euros par an jusqu’en 2026, selon des médias catalans. Un tournant dans l’histoire du FC Barcelone, dont le slogan est justement “Plus qu’un club”, et qui a longtemps tenté de résister au développement du foot business en s’appuyant sur son centre de formation et sa culture. Mais la pandémie, « le creusement d’une dette abyssale » et le « besoin de financement pour la rénovation du Camp Nou » ont « accéléré certaines réflexions, » estime Magali Tézenas du Montcel, déléguée générale de SPORSORA et experte de l’économie du sport.
“Plus agressive”
Selon William Miller, professeur de marketing du sport à l’Université du Wisconsin-Parkside, « la pandémie a sans aucun doute mis la pression sur les entités sportives pour qu’elles soient plus agressives dans la recherche de toutes les sources de revenus disponibles, y compris les droits de naming ». Il s’agit, pour Pierre-Emmanuel Davin, « d’un prolongement d’une tendance de fond, qui a effectivement été accélérée depuis la pandémie. »
Pour William Miller, « il est tout à fait possible que nous assistions au début de cette nouvelle ère » du sponsoring sportif, dominée par ces nouveaux venus (cryptomonnaies, services en ligne, plateformes…). « Mais il faut souligner que les secteurs industriels nouveaux et en croissance ont tendance à être des acheteurs plus agressifs de droits de dénomination et d’autres parrainages sportifs très visibles ». Ce qui explique la multiplication, depuis le début de la pandémie, des contrats de sponsoring de firmes spécialisées dans les cryptomonnaies.
Recherche de visibilité –
La plateforme Crypto.com, qui s’est offert le naming de l’ancien Staples Center, mythique enceinte des deux franchises NBA de Los Angeles, adopte l’une des stratégies d’influence les plus agressives du secteur, multipliant les partenariats avec de grands noms du sport. La firme, déjà partenaire du Paris Saint-Germain et s’affichant par exemple sur les circuits de Formule 1 et sur les monoplaces Aston Martin, est devenu l’un des sponsors principaux de la Coupe du monde masculine de football 2022 au Qatar. En Premier League, 18 clubs sur 20 ont par exemple signé des partenariats avec des plateformes de cryptomonnaies cette saison, comme Socios.com, OKX ou learncrypto.com.
Ces types de sponsors se font de plus en plus nombreux sur les parquets de NBA, ou dans les stands de Formule 1. C’est le cas de FTX, sponsor de l’enceinte du Miami Heat et de l’écurie Mercedes, Tezos, sponsor maillot de Manchester United et de l’écurie Red Bull, sponsorisée également par Bybit, une autre plateforme de crypto. « Au niveau mondial, on projette les investissements sponsoring pour les acteurs des cryptomonnaies à 5 milliards de dollars d’ici 2026, soit une augmentation de 800% par rapport à aujourd’hui, » explique Pierre-Emmanuel Davin.
« Ce sont des entreprises en recherche de visibilité, de notoriété. Et ils utilisent le sponsoring comme un outil, un levier pour se faire connaître, mettre en avant leurs produits et leurs services, notamment auprès des bases de fans, qui sont des publics captifs, larges, pour créer des audiences importantes« , ajoute le patron de Nielsen Sports. Ces types de sponsors doivent toutefois faire face à une forte régulation. Ils ne sont souvent pas autorisés à faire de la publicité directe, et choisissent « des systèmes de fidélité, des points, des tokens ». L’objectif ? Faire de la cryptomonnaie « un élément constitutif de l’expérience du fan, » conclut Pierre-Emmanuel Davin. (AFP)
Par Arno Tarrini
© SportBusiness.Club Avril 2022