J’ai descendu la rivière olympique de Paris 2024

Jeux olympiques

Ca commence comme dans un parc de loisirs. Le large raft gonflable dans lequel j’ai pris place, une pagaie à la main et la fesse posée sur le boudin gauche du bateau, s’élève doucement posé sur un tapis roulant. Sauf qu’en haut, ce qui m’attend, c’est la rivière des futures épreuves olympiques de Paris 2024 de canoë-kayak. Les rapides sauvages bouillonnent deux mètres devant moi. Me voilà prêt (*) à les affronter avec l’aide de quelques de confrères embarqués dans la même galère.

C’est ce samedi 22 juin qu’est inaugurée la base nautique olympique de Vaires-sur-Marne. Le site, en Seine-et-Marne et à la limite de la Seine Saint-Denis, est le premier à se prévaloir officiellement de la dénomination « olympique ». Ses 150 hectares accueilleront en 2024 les épreuves d’aviron et de canoë-kayak. Les courses en ligne se disputeront sur le lac de 90 hectares et de 2 kilomètres de long, voisin de la Marne mais alimenté par eaux de la nappe phréatique. Juste à côté, une rivière artificielle de 300 mètres accueillera les compétitions de slaloms en canoë-kayak. Celle que je m’apprête à descendre.

Le parcours conçu par Hydrostadium, une filiale d’EDF, vient tout juste d’être terminé. Dans la rivière, le débit maximal de l’eau atteint 14 mètres cube par seconde. Sur le papier, cette notion est un peu difficile à estimer pour un parfait novice du canoë de descente comme moi. Les remous que l’on affronte avec le raft offrent une vision beaucoup plus claire. Le bateau prend de la vitesse, se cabre, tourne au gré des tourments de la rivière et nos coups de pagaies ont peu d’influence sur le contrôle de l’embarcation. Bringuebalés d’une rive à une autre, d’un obstacle à l’autre, nous atteignons enfin, mouillés, ce qui sera la future ligne d’arrivée olympique. Plus efficaces, les champions, en canoë et kayak, seront encore plus secoués, mais iront beaucoup plus vite que nous.

«Pas un éléphant blanc !»

L’ensemble de Vaires-sur-Marne est la première structure programmée pour Paris 2024 qui sort de terre. Un symbole, d’autant que le canoë est le sport de prédilection du président du Comité d’organisation (Cojo), Tony Estaguet, et l’aviron celui du président du Comité olympique français (CNOSF), Denis Masseglia. L’aménagement du plan d’eau, la réalisation de trois rivières d’eaux vives, dont celle destinée aux compétitions, et la construction de différents bâtiment, avec un centre d’hébergement de 140 lits, a coûté 95 millions d’euros. La Région Ile-France en apporte la plus grande partie : 80 millions. Le solde est financé par l’ex fonds du CNDS (11 millions) et la Solidéo (3,5 millions). La Fédération française de canoë-kayak et le centre sportif de celle d’aviron y ont déjà élu domicile.

«C’est le plus grand et plus beau site de canoë-kayak et d’aviron au monde,» s’enflamme Vincent Roger, élu LR au Conseil régional d’Île-de-France et délégué spécial de la Région pour Paris 2024. «Ce site symbolise notre volonté d’aménagement du territoire, affirme-t-il. Mais nous avons aussi deux défis à relever. L’héritage d’abord, car il ne faudra pas que la base ne devienne pas un “éléphant blanc” après les Jeux. La mobilisation de la jeunesse, ensuite, qu’il faudra faire venir.».

La rivière ouverte au grand public

Géré par l’UCPA, le site repassera entièrement dans les mains de la Région Ile-de-France après 2020. La collectivité annonce un projet économiquement pérenne. «L’équilibre de la base nautique repose sur la double pratique : le haut niveau, avec l’accueil de délégations et de sportifs pour l’entraînement, et les loisirs outdoor destinés au grand public et à la famille,» explique Julien Nemeth, chef de projet de développement de la base. Aussitôt inaugurée, la base nautique sera d’ailleurs ouverte à tout le monde. Balades, running et VTT sont déja possibles. Sur le lac pourront être organisées des initiations de voile, et les plus téméraires s’offriront un baptême dans la rivière olympique en raft ou même hydrospeed. Un parcours plus calme est également possible. L’idée n’est pas de réserver cet équipement aux seuls compétiteurs.

La Région Ile-de-France espère ainsi faire vivre le lieu et le rentabiliser, durant les cinq prochaines années, en attendant que la base nautique prenne ses habits olympiques en 2024 avec l’installation de gradins temporaires : 15.000 places seront déployées sur le bord du lac et autant autour de la rivière. Le site pourra alors accueillir plus de 30.000 spectateurs quotidiens. Certains auront eu la chance en amont de se mesurer en réel sur ce parcours où l’élite mondiale se disputera l’or olympique.

(*) Je reconnais que ce n’est pas moi sur la photo illustrant cet article…

© SportBusiness.Club. Juin 2019