Des entraîneurs mieux payés pour plus de médailles en 2024

Le bilan décevant des Jeux olympiques de Tokyo pas encore digéré, le compte à rebours a démarré pour Paris 2024: le retour en France de certains entraineurs tricolores et le recrutement de pointures internationales a commencé, avec en toile de fond la question de leur rémunération. Pour gagner plus de médailles que les 33 du Japon, et passer à l’objectif de 80 médailles plus ou moins affiché, il va falloir faire fort, de l’avis de tous les observateurs.

Entrer dans le Top 5 mondial, comme l’a dit Emmanuel Macron en recevant les médaillés de Tokyo à l’Elysée début septembre ? « C’est moi qui ai lancé l’idée, » expliquait après la cérémonie Claude Onesta, ancien fabriquant de médailles olympiques du hand français, et actuel boss du haut niveau à l’Agence nationale du sport (ANS). Celle-ci a présenté mardi ses orientations pour 2024. Mais la marche est haute.

Parmi les axes de travail, un plan “Coach 2024”: s’entourer des meilleurs entraîneurs et mieux les rémunérer. En réalité, le débauchage d’entraîneurs étrangers et le retour de certains entraîneurs français a déjà commencé. Ainsi avant l’été, la fédération française de natation a recruté Jacco Verhaeren, l’ancien entraîneur néerlandais de l’équipe d’Australie. « Un premier investissement de 200 000 euros, participant à la masse salariale de Jacco Verhaeren, aux coûts de fonctionnement ainsi qu’à la valorisation des entraîneurs des structures d’excellence, a été convenu entre l’ANS et le président de la fédération, » avait alors fait savoir Claude Onesta cité par le site de la fédération.

Le volley, qui a brillé en or à Tokyo avec Laurent Tillie à sa tête, a quant à lui engagé la légende brésilienne Bernardinho. La fédération française de gym vient de se payer les services d’un entraîneur ukrainien, Vitaly Marinich, qui a longtemps œuvré aux USA. Dernière arrivée en date annoncée en fanfare par l’aviron français: l’Allemand Jürgen Grobler, longtemps entraîneur à succès de l’aviron britannique.

“Ca bouge”

Parallèlement à ces pointures internationales, des entraîneurs français reprennent du service en France, comme Hugues Obry, parti entraîner les épéistes chinois. « Faire revenir les entraîneurs de l’étranger, cela peut être une bonne solution, que cela soit la solution à tous nos problèmes, je n’en suis pas convaincu, » observe Ludovic Royé, président de l’Association des directeurs techniques nationaux (DTN).Certains sont partis pour l’argent ou pour des parcours différents. En 2016, Siegfried Mazet, l’entraîneur du biathlète Martin Fourcade, a rejoint la Norvège et n’avait pas caché aussi ses motivations financières. Car là où le salaire net moyen oscille entre 2 000 et 2 500 euros en France, en début et milieu de carrière, il est multiplié par quatre ou cinq à l’étranger.

Si la rallonge touchée dans le cadre des contrats de préparation olympique est un petit plus, elle ne permet toutefois pas de s’aligner. « La question de la valorisation à l’instant T et sur le moyen/long terme de la carrière est l’une des faiblesses du système français, » résume Ludovic Royé, pointant un problème “d’attractivité” de tous les postes à responsabilité, “symptôme inquiétant”. « Souvent, quand les gens partent c’est parce qu’en interne ils n’ont pas réussi à trouver le déroulement de carrière qu’ils voulaient, décrypte-t-il. Une fois partis, ils ne peuvent plus revenir, car la valorisation française est insuffisante ». D’où la nécessité d’une “meilleure reconnaissance de l’encadrement”, y compris financière, prônée par Claude Onesta.

Entraîneur de la fédération française de gym, basé au pôle d’Antibes, Rodolphe Bouché a déjà été approché plusieurs fois pour s’expatrier. Pour aller en Inde, on lui a proposé quatre fois son salaire. Mais, il n’a pas l’âme d’un « mercenaire » et trouve que son statut de CTS (conseiller technique et sportif) lui garantit une stabilité. Quand on part à l’étranger, « c’est un système beaucoup plus précaire, du jour au lendemain cela peut s’arrêter et vous rentrez chez vous, » explique-t-il. D’autres, comme Cécile et Laurent Landi, les entraîneurs français de la gymnaste américaine Simone Biles, et d’autres championnes olympiques américaines, ont tenté un autre parcours aux Etats-Unis. Petit signe encourageant: « Avant Tokyo, quand j’ai vu qu’il y aurait aussi des primes pour les entraîneurs (quand les sportifs remportent une médaille, ndlr), je me suis dit “ça y est, ça bouge”, » a noté Rodolphe Bouché.

Par Déborah CLAUDE
© Agence France-Presse Octobre 2021