Gagner plus pour distribuer plus, en particulier hors d’Europe où se concentre encore l’argent du football: telle est la clé du système Fifa, qui garantit aussi à son président Gianni Infantino, en passe d’être réélu ce jeudi 16 mars 2023 lors du Congrès de Kigali, une assise politique extrêmement large. Organisée tous les quatre ans depuis 1930 chez les hommes et 1991 chez les femmes, les Coupes du monde assurent à l’instance sportive installée à Zurich (Suisse) l’essentiel de ses revenus, calculés selon un cycle quadriennal, et qui continuent à progresser.
C’est particulièrement le cas pour la période 2019-2022, critique puisqu’elle a cumulé pandémie de covid 19, qui a mis le sport mondial à l’arrêt pendant plusieurs mois, et Coupe du monde au Qatar, entachée depuis son attribution fin 2010 par de multiples polémiques: soupçons de corruption, bilan environnemental, droits des travailleurs et des personnes LGBT.
Mais ni les menaces de boycott, ni la programmation inhabituelle du tournoi au début de l’hiver, du 20 novembre au 18 décembre 2022, au lieu du début de l’été, n’ont empêché la Fifa de boucler son cycle par un nouveau record, avec des revenus de 7,6 milliards de dollars, en hausse de 18% par rapport à la période précédente, déjà marquée par le succès commercial du Mondial 2018 en Russie.
Le Mondial 2026 encore plus fort
Quant aux réserves de l’organisation, elles ont grimpé à 3,9 milliard de dollars (+45% par rapport au cycle précédent), un trésor de guerre suffisamment confortable pour avoir pu mettre à disposition 1,5 milliard de subventions et de prêts liés au Covid pour les fédérations. D’ores et déjà, l’instance s’attend à voir ses revenus grimper à 11 milliards de dollars en 2023-2026, soit 44,7% de plus qu’en 2019-2022, portés par une hausse à la fois des droits TV, des droits marketing et de la billetterie.
Irréaliste, dans une période où nombre d’organisations peinent face à un marché des droits TV toujours plus concurrentiel et craignent un désintérêt des plus jeunes pour le spectacle sportif ? Pas nécessairement puisque le prochain Mondial de 2026 devrait être “celui de tous les records”, estime Raffaele Poli, économiste au CIES de Neuchâtel. Non seulement le plus grand tournoi masculin du monde sera coorganisé entre Mexique, Canada et Etats-Unis, promettant ainsi de vastes stades bondés, mais il passera en plus de 32 à 48 équipes, alléchant les diffuseurs et tenant seize pays supplémentaires en haleine.
Redistribution et carte électorale
Comme toutes les organisations sportives, la Fifa conserve une partie de ses revenus, notamment pour organiser ses compétitions et rémunérer ses 814 salariés. C’est le cas de son premier, le Président : Gianni Infantino percevrait jusqu’à 3,6 millions de francs suisses annuels en incluant une part variable. Mais la Fifa affecte aussi le reste à des programmes de développement en subventionnant ses six confédérations et 211 fédérations nationales, sans proportionner les sommes versées à leur taille: les îles-confettis caribéennes d’Aruba ou de la Barbade peuvent ainsi recevoir autant voire plus que l’Allemagne ou le Brésil.
L’organisation souligne avoir “multiplié par sept” ses contributions de solidarité en sept ans, en particulier via son programme phare “Fifa Forward”, entré en janvier dernier dans son troisième cycle: d’ici 2026, chaque association membre touchera jusqu’à 5 millions de dollars pour couvrir ses coûts opérationnels, jusqu’à 3 millions supplémentaires pour des projets spécifiques et, pour “les plus en difficulté”, 1,2 million de plus pour “les frais de déplacement et d’hébergement de leurs équipes nationales, ainsi que l’achat d’équipement”.
Ces montants sont bien sûr appréciés des principales nations de football, mais ils sont bien plus essentiels, voire vitaux, pour la grande masse de fédérations plus modestes, entretenant à l’égard de la Fifa une loyauté particulière qui recoupe la carte électorale de l’instance: chaque association dispose d’une voix pour élire le président, quelle que soit son importance.
Par Coralie Febvre – Agence France-Presse
© SportBusiness.Club Mars 2023
Les partenaires* mondiaux de la Fifa
- Adidas
- Coca-Cola
- Wanda Groupe
- Hyundai/Kia
- Qatar Airways
- Qatar Energy
- Visa
(*) Source Fifa, au 15 mars 2023
Mise à jour, jeudi 16 mars 2023. Le suisse Gianni Infantino a été réélu à la présidence de la Fifa par acclamation. Il entame un mandat de 4 ans jusqu’en 2027, le deuxième complet.