Combien coûteront les Jeux de Paris 2024 et qui paiera ? A côté d’un budget d’organisation qui grimpe au gré de l’inflation et des imprévus, beaucoup de coûts de ces Jeux voulus « sobres » restent inconnus, comme celui de la sécurité. Chaque édition olympique connaît un dérapage financier, souvent plusieurs milliards en plus par rapport à l’enveloppe prévue au départ.
Dernier cas en date, aggravé par la crise sanitaire du Covid et leur report d’un an: les Jeux de Tokyo de 2021 ont coûté 12 milliards d’euros selon la Cour des comptes japonaises, soit près de deux fois plus que dans le dossier de candidature. A Paris, l’addition affichée est actuellement de 8,8 milliards d’euros, quand en 2017, elle était de 6,6 milliards.
D’un côte, le budget du comité d’organisation (Cojo), qui repose sur les recettes de billetterie, celles des sponsors et une contribution du Comité international olympique (CIO). A 96% d’origine privé, il est passé à 4,4 milliards d’euros fin 2022, une hausse de 10% à moitié due à l’inflation. Il a gonflé de 600 millions d’euros depuis 2018. De l’autre côté, la Solideo (Société de livraison des ouvrages olympiques), qui construit le village olympique notamment, a elle un budget autour de 4,4 milliards d’euros dont 1,710 milliard d’argent public (Etat et collectivités).
La lourde part de la sécurité
Mais, en réalité cette somme de 8,8 milliards ne comprend pas toute une série de coûts. Et observe la Cour des comptes dans un rapport publié en janvier: “cette présentation, qui mélange des dépenses publiques et des dépenses privées de diverses natures, repose sur des périmètres conventionnels qui ont évolué et ne sont en tout état de cause pas représentatifs de l’ensemble des dépenses réellement engagées”. En clair, un, on ne peut pas faire l’addition et, deux, on mélange des choux et des carottes.
Par exemple, ce montant de 8,8 milliards d’euros n’intègre pas les coûts liés à la sécurité. Pour les forces de sécurité publique, un “premier chiffrage” cité dans un pré-rapport de la Cour des comptes à l’été 2022 évoque “419 millions d’euros”. Mais ce chiffre pourrait bien grossir car le dispositif n’est pas encore calé. Et de surcroît pour s’assurer des policiers disponibles tout l’été, il va falloir “leur donner une ‘putain de prime’ ! », assure un ancien responsable policier.
A ce stade, l’Etat, dans le documents budgétaires 2023, calcule en cumulé 2,166 milliards d’euros de dépenses publiques pour les Jeux, dont 1,157 milliard d’euros pour l’Etat. L’addition va grimper. En plus des dépenses de sécurité, il y en aura liées aux transports, à la santé, mais aussi à certaines exonérations fiscales. Comme l’exonération fiscale accordée à Oméga, chronométreur officiel des Jeux olympiques, et estimée “à environ 4 millions d’euros”, toujours selon le budget 2023.
Une estimation néanmoins lâchée en janvier dernier par Pierre Moscovici, président de la Cour des comptes: l’investissement public de l’Etat et collectivités pourrait atteindre “autour de 3 milliards d’euros” au final. Un pronostic car “la Cour n’est pas en mesure, à ce stade, d’établir le coût réel des Jeux et son impact total sur les finances publiques”. Et une “partie ne sera d’ailleurs connue qu’après l’événement”.
Comment faire la part des choses?
Il sera parfois difficile de faire la part des choses entre ce qui est acheté exclusivement pour les Jeux ou non: “L’achat des drones ne peut être imputé aux Jeux dans la mesure où il serait intervenu à plus ou moins long terme indépendamment des Jeux et où ils continueront d’être utilisés après”, estime l’exécutif.
Ainsi, l’Etat a aussi rajouté récemment plusieurs millions pour le nouveau laboratoire antidopage et qui se justifie selon lui par le fait que la France aura après l’événement un laboratoire antidopage de standard élevé. La formule “les Jeux financent les Jeux” a déjà été mise à mal quand l’Etat et les collectivités ont décidé d’ajouter 111 millions d’euros fin 2022 au budget du comité d’organisation.
“C’est du pragmatisme budgétaire”, explique une source proche du monde olympique, interrogée par l’AFP sur le transfert de petites lignes budgétaires, du Cojo à la Solideo, en repassant par l’Etat. La facture réelle sera connue seulement après 2024 et les Jeux olympiques et paralympiques.
Par Déborah Claude – Agence France-Presse
© SportBusiness.Club Mars 2023