Ce vendredi 2 décembre 2022 marquait, malheureusement, la fin de mon aventure qatarie. Par conséquence aussi de ces chroniques in-situ. Séquence émotion pour le rédacteur de ces lignes. Au moment de refermer ma valise, plus violette que jamais, je n’oublie pas d’y loger de nombreux souvenirs de cette Coupe du Monde de football. La première en ce qui me concerne. Les matchs de l’Equipe de France en tribune presse ? Inoubliables ! La rencontre avec Souley, supporter sénégalais ? Magique ! Ma coupe de champagne en espace VIP ? Etonnant !
Puis, me revient cette soirée organisée par des expatriés français au Qatar, la veille du coup d’envoi du Mondial. Le tube intemporel de Patrick Juvet “Où sont les femmes”, qui y a été joué, résonne encore dans ma tête. A cet instant, mon côté polémiste y avait vu un peu de provocation de la part du DJ de la soirée. En effet, j’avais pris la route de l’émirat accompagné de beaucoup d’a-priori sur le Qatar et cette organisation si critiquée. « Tu verras là-bas, m’avait-on répêté, il n’y aura pas beaucoup de femmes dans les stades, ni dans les rues. »
Du coup, ce fut une surprise pour moi lors du match d’ouverture entre le Qatar et l’Equateur de remarquer, même si la parité n’était pas au rendez-vous dans les tribunes du stade Al-Bayt, que les femmes étaient là, au rendez-vous, en nombre et visibles. Généralement vêtues de noir, les qatariennes se distinguaient en effet assez facilement dans la foule par rapport aux tenues traditionnelles blanches portées par les hommes. En revanche, les femmes n’étaient ni en tribune presse, ni au centre de presse.
Un regard de jeune journaliste
Et pourtant, partout dans Doha, des files d’attente aux zones de sécurité, tout avait été spécialement mis en place pour recevoir mes consœurs internationales. La superficie de leurs toilettes (oui, j’ai vérifié…) était identique aux notres. Bref, tout était prêt pour elles, rédactrices, « reporteures », photographes ou techniciennes du monde entier. Mais les faits sont implacables : au Qatar, pour une Coupe du Monde de football, les journalistes de sport présents sont pratiquement tous des hommes. L’AFP m’a confirmé cette réalité : la part des femmes dans ses effectifs ici n’est que de 10%.
Cette chronique n’est pas une analyse sociologique. Je n’en ai ni la légitimité, ni les connaissances. C’est seulement et sobrement le regard surpris du jeune journaliste que je suis, sans doute un peu naïf mais féministe, durant la couverture éditoriale de sa première grande compétition sportive internationale. Ce jeudi 1er décembre 2022, Patrick, encore lui, a accompagné la dernière descente de tribune presse avant mon retour en France. En bas, j’ai jeté un ultime regard vers celle-ci… et comme un symbole le refrain m’est aussitôt revenu : “Où sont les femmes ?”.
Titouan Laurent, envoyé spécial à Doha (Qatar)
© SportBusiness.Club Décembre 2022