Vidéosurveillance et “criblages” des accrédités dans la loi olympique

Vidéosurveillance “intelligente”, enquêtes administratives sur les personnes accréditées, et encore ouverture des commerces le dimanche, finalement restreinte: l’Assemblée nationale a achevé tard dans la nuit de jeudi 23 mars 2023 l’examen du projet de loi olympique, avant son vote d’ensemble mardi prochain. Dans la dernière ligne droite, les députés ont planché sur les dérogations au repos dominical pour les salariés des commerces dans les communes où se dérouleront en 2024 des épreuves, et dans des communes limitrophes.

Sur proposition des élus communistes et de la co-rapporteure Christine Le Nabour (Renaissance), la période concernée a été réduite d’un mois, et ramenée du 15 juin au 15 septembre 2024. Cela doit permettre de préparer les Jeux, qui démarreront avec les olympiques le 26 juillet, et de couvrir jusqu’à la fin des paralympiques, dimanche 8 septembre. La ministre des Sports Amélie Oudéa-Castéra a donné un avis favorable à cette modification, alors que la gauche a bataillé pour resserrer encore les dérogations.

Pendant plusieurs heures, les députés ont poussé sur l’accélérateur pour écluser des centaines d’amendements sur ce texte comprenant un large volet sécuritaire, qui prépare les Jeux de Paris 2024 mais va au-delà. Il a déjà été approuvé par le Sénat dominé par la droite en janvier dernier, et sera soumis donc au vote solennel de l’Assemblée mardi, au bout de cette première lecture entamée en début de semaine.

Auparavant, l’Assemblée nationale avait approuvé le recours à de la vidéosurveillance dite “intelligente”, basée sur des algorithmes, que l’exécutif veut expérimenter avant et pendant les Jeux de Paris 2024, malgré les craintes de dérives sécuritaires de la gauche. L’article 7 du projet de loi olympique a été adopté avec 59 voix pour (majorité présidentielle – LR – RN) face à 14 contre (Nupes). Il prévoit à titre expérimental que la sécurisation “de manifestations sportives, récréatives ou culturelles” d’ampleur puisse recourir à des algorithmes.

Vidéosurveillance “intelligente” à France 2023

Les Jeux olympiques et paralympiques sont en ligne de mire mais l’expérimentation, qui doit s’arrêter fin 2024, pourrait démarrer dès la promulgation de la loi, et concerner, notamment, la prochaine Coupe du monde masculine de rugby en France dont le coup d’envoi sera donné le 8 septembre prochain. Le but affiché: analyser les images captées par des caméras et des drones, pour détecter automatiquement des faits ou gestes potentiellement à risque.

La liste des “événements” à détecter doit être fixée par décret. Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a cité en exemple “un départ de feu, des goulots d’étranglement de population, un colis ou un sac abandonné”. Les députés de la Nupes s’inquiètent du possible dévoiement de cette technologie, craignant que les Jeux ne servent de tremplin pour généraliser par la suite ce type de surveillance à la population. « Les événements prédéterminés concernent non pas des personnes mais des situations, » a insisté Gérald Darmanin, sans les convaincre. Les associations de défense des libertés sont contre, comme le Conseil national des barreaux.

Les députés de l’opposition ont tenté de circonscrire davantage l’expérimentation, de la cantonner aux abandons de bagage, ou d’imposer le fait que l’Etat soit seul responsable de l’analyse des données, sans recourir au privé, mais sans succès. Un amendement du RN Aurélien Lopez-Liguori, président du groupe d’étude sur la sécurité et la souveraineté numériques, a été adopté, pour prioriser le recours à des entreprises européennes. Mais le fait que des députés de la majorité, membres de ce groupe d’étude, ont cosigné ou sous-amendé cet amendement RN, a indigné à gauche.

“Criblages”

L’Assemblée Nationale a aussi adopté l’extension du champ des “criblages”, ces procédures d’enquêtes administratives existant actuellement pour l’accès à de grands événements. Le but est qu’elles puissent concerner également les “participants”, comme les athlètes et leurs équipes, les diffuseurs ou les partenaires. L’accès aux “fan zones”, où seront retransmis des événements, a aussi été inclus.

Députés insoumis et écologistes ont dénoncé des mesures “disproportionnées” et “intrusives”, s’inquiétant que des personnes puissent être exclues en raison d’opinions politiques. Ils ont notamment échoué à obtenir l’exclusion des journalistes du champ des criblages. La ministre des Sports Amélie Oudéa-Castéra a expliqué qu’il fallait se prémunir contre des personnes présentant “des cartes de presse factices”. Elle a aussi insisté sur le fait que les criblages ne concerneraient pas les spectateurs.

Autre disposition critiquée par la gauche: les sanctions en cas d’intrusion dans une enceinte sportive seront durcies, dès la promulgation de la loi. La ministre des Sports a assuré qu’il ne s’agissait pas de “museler la liberté d’expression”, par exemple de militants écologistes. L’Assemblée a donné son feu vert pour que la peine d’interdiction de stade devienne obligatoire en cas d’atteinte grave à la sécurité des événements sportifs.

Enfin, le Parlement a par autorisé l’extension des compétences du préfet de police de Paris, en matière de sécurité aux départements des Yvelines, du Val d’Oise, de l’Essonne et de Seine‑et‑Marne, du 1er juillet au 15 septembre 2024. (AFP)

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Mise à jour : vendredi 24 mars 2023